Edina Alves va entrer dans l’histoire en devenant la première femme à arbitrer une compétition masculine majeure organisée par la Fifa : le Mondial des clubs. Avant d’arriver au sommet, la Brésilienne est passée par des épisodes tragiques qui ont forgé son caractère. Voici son parcours.
Le visage d’Edina Alves est apparu au grand jour lors de la coupe du monde 2019 en France. La Brésilienne a fait ses premiers pas dans le grand monde en arbitrant le match de poules entre les Pays-Bas et la Nouvelle-Zélande. Surtout, c’est elle qui a dirigé la demi-finale entre l’Angleterre et les États-Unis. « C’était incroyable. Quand je repense à tout ce qui m’est arrivé, à tout ce que j’ai vécu… je ne regrette rien », expliquait-elle sur le site de la Fifa. Car avant d’en arriver là, Alves a dû gravir des montagnes.
En 1999, alors qu’elle s’apprête à souffler ses 20 bougies, la jeune sud-américaine est employée dans une pépinière à Parana. Un État central dans l’ouest du pays. Issue d’une famille modeste, elle se lève dès potron minet et travaille d’arrache-pied pour payer ses études. Quand son patron la conviait à 6h30, Alves venait plus tôt pour s’offrir des heures supplémentaires. Le travail est éreintant et le salaire bien trop maigre, mais qu’importe. Une ambition inaltérable germe dans son esprit : devenir footballeuse professionnelle.
Vocation arbitre
Alves investit alors la grande majorité de son pécule pour assouvir ses rêves de jeunesse. Elle se fait même un petit nom dans le monde du futsal en participant à des compétitions nationales avec la région Sud. Mais à l’époque, son environnement n’était pas particulièrement favorable à l’émancipation des femmes. « Dans les années 90, il était impossible d’imaginer devenir footballeuse », concédait-t-elle. Sa propre mère assurait « qu’être arbitre n’était pas une affaire de filles. Elle voulait que je prenne des cours de dactylographie ou de peinture. »
C’est donc vers un autre métier que la jeune adulte va se tourner. Encouragée par un ami de son père, elle tombe amoureuse de l’arbitrage. Commence alors un véritable parcours du combattant. Alves poursuit son activité à la pépinière le matin et enchaîne avec des formations d’arbitre avant de terminer ses journées sans fin par des cours pour être professeur d’éducation physique.
La plupart n’aurait pas tenu deux semaines, elle s’est acharnée pendant deux ans. « C’était épuisant mais à chaque fois que j’arrivais pour remplir ces sacs, je me disais : ‘Ça va me permettre de faire ce que je souhaite le plus au monde : arbitrer des matches de football’. » Et d’ajouter : « Il n’y avait pas que la formation. Il fallait aussi payer les déplacements le week-end. Parfois, nous devions faire 550 kilomètres juste pour un cours. »
« Trois mois après l’accident, j’étais de retour sur le terrain »
Après de longs mois qui se sont transformés en années, son abnégation a fini par porter ses fruits. La Brésilienne franchit toutes les étapes avec brio. Elle commence par les étages scolaires et amateurs avant d’être propulsée dans la liste des arbitres candidats de la CBF (confédération brésilienne de football). En 2007, Alves passe l’intégralité des tests avec succès mais échoue à la seconde place régionale. Elle se consolera donc avec le poste d’assistante.
Quelques semaines plus tard, la jeune femme frôle la mort dans un accident de voiture. Elle passera quatre jours en soin intensif et fera de ce nouveau coup du sort une force. « Je n’avais qu’une idée en tête sur mon lit d’hôpital : diriger un match. Les docteurs m’ont dit que ça n’arriverait pas avant très, très longtemps. Mais trois mois après l’accident, j’étais de retour sur le terrain. »
La trentenaire se rapproche du graal en 2014 après une rencontre avec Sergio Correa, le président de la commission des arbitres de la CBF. Ce dernier voit en elle une arbitre internationale en puissance et la positionne tout en haut de l’échiquier. La suite lui donnera raison. En 2019, Alves met fin à 14 ans d’absence féminine en prenant le sifflet en Serie A brésilienne.
Les JO en ligne de mire
Depuis, Edina Alves est entrée dans une nouvelle dimension : « Beaucoup de femmes m’écrivent sur les réseaux sociaux parce qu’elles me considèrent comme un modèle de réussite. La plupart ne veulent même pas être arbitres mais apprécient ce que je représente dans le monde du travail », soulignait-elle au site brésilien Futebol Nacional.
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Cette reconnaissance lui permet de se consacrer uniquement à son activité de femme en noir. Elle qui s’est installée depuis peu à Sao Paulo, la capitale économique de pays. La Sud-Américaine arrive avec le plein de confiance au Mondial des clubs, auquel participe notamment les Tigres et le Bayern Munich. La native de Goioere dirigera un trio 100% féminin avec son acolyte et compatriote Neuza Back et l’Argentine Mariana de Almeida. Son prochain objectif ? Disputer les Jeux Olympiques.
Mickaël Duché