Interrogée par l’AFP, Ada Hegerberg estime que la crise sanitaire ne doit pas interrompre le fragile essor du football féminin. Pendant le confinement, l’attaquante norvégienne de 24 ans a fait le choix de rester à Lyon pour terminer la rééducation de son genou droit. Elle s’inquiète des effets de la pandémie de coronavirus sur sa discipline et appelle les footballeuses à « continuer à se battre pour (leurs) droits ».
Comment vivez-vous le confinement ?
Cette situation est à la fois très simple et très bizarre. Je suis comme tout le monde, j’essaie de rester calme… Je discute avec ma famille à Oslo. Mon kiné vient chez moi et il a tout l’équipement nécessaire pour ma rééducation. J’ai hésité à retourner en Norvège, mais finalement je suis restée parce qu’ici j’ai mon vélo, mon balcon, et tous les kinés sous la main. J’ai essayé de partir en Pologne, là où vit mon mari, mais ils sont confinés eux aussi, et les frontières sont fermées. C’est dur d’être loin de ma famille, mais j’ai décidé de rester.
Comment va votre genou ?
Ça va. Avec ce genre de blessure, on passe par des hauts et des bas. Mais là ça y est, je suis d’attaque. On avance à la vitesse voulue. J’ai beaucoup de respect pour les athlètes qui sont revenus encore plus forts après ce genre de blessure. Je m’inspire beaucoup d’eux. C’est l’un des plus gros défis de ma carrière, c’est certain. Mais c’est une opportunité pour grandir. Donc j’ai fouillé de nouveaux aspects de ma personnalité et de mon jeu pour revenir plus forte.
Comment vous-y êtes-vous prise ?
J’ai regardé des vidéos. Tu peux progresser de bien des manières sans toucher un ballon. Je regarde nos matches, je me regarde. Pour moi, la visualisation, c’est la partie la plus importante de la préparation mentale. J’ai revisionné la finale de la Ligue des champions de la saison passée un paquet de fois, je l’avoue, juste pour retrouver ces bonnes sensations.
Pensez-vous que la saison 2019-2020 pourra aller à son terme ?
Ce sera très difficile à finir, honnêtement. Il y a tellement de risques partout en ce moment que c’est dur pour moi de dire si on doit reprendre la saison. Tout est si incertain… Mais quelle que soit la décision, il y aura toujours des mécontents.
Pensez-vous que cette crise sanitaire peut nuire au développement du football féminin ?
Il est primordial que le football féminin ne perde pas sa place. Le foot masculin passe en premier, avec toutes les questions concernant l’argent et la reprise des championnats, mais il est aussi très important que le foot féminin continue sa progression. On sera au second plan durant toute la durée du confinement, mais il est crucial qu’on ne soit pas reléguées dans l’ombre. Le foot féminin en est encore à ses premiers pas, donc on doit continuer à se battre pour nos droits.
L’Euro féminin en 2021 a été déplacé pour laisser place à l’Euro masculin. Avez-vous le sentiment d’être les « grandes oubliées » de la paralysie du football?
C’est un vrai débat. Je comprends l’importance des droits TV, parce que nous, on en profite aussi. On a aussi besoin du foot masculin pour être stable, et pour se développer jusqu’à ce que l’on soit en mesure de vivre par nos propres moyens. On voit que les plus gros clubs sont en difficulté, donc on peut imaginer à quel point cette crise va affecter les équipes féminines.
Vous êtes en contrat jusqu’en juin 2021. Resterez-vous à Lyon après?
J’ai connu les meilleures années de ma carrière à Lyon. Ca a été une période incroyable. Ma tête est à Lyon. Je me concentre sur ce que je peux faire pour l’équipe. Mon club, c’est Lyon, et je me dévoue à 100% à l’équipe pour le moment.
AFP