Milieu de terrain défensive avec le Racing Club de Strasbourg Alsace féminin, la jeune Alsacienne Mégane Hoeltzel (19 ans) s’impose saison après saison, en club comme en sélection. Entretien.
Comment êtes-vous tombée dans le football ?
J’ai grandi dans une famille de footballeurs, mon père, ancien joueur, entraînait mon frère, j’allais voir les entraînements et automatiquement je me suis entraînée avec eux. Au fur et à mesure, j’ai pris une licence, à l’âge de 5 ans.
Avez-vous des inspirations particulières ?
Paul Pogba pour son style de jeu et sa personnalité. Je suis plutôt calme pour ma part, réservée.
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Votre évolution a été plutôt logique et vous êtes actuellement étudiante à Strasbourg à côté ?
Je suis étudiante au CREPS, dans le but de devenir coach sportif. J’ai commencé le football à 5 ans, j’ai joué en mixité jusqu’à 15 ans, puis j’ai intégré le pôle espoir de Strasbourg. Je me suis orientée vers Vendenheim pour jouer avec les U19 et j’ai intégré directement la D2 pour la préparation d’avant saison. Finalement, dès le premier match de championnat j’ai été appelée par le coach et j’ai fait trois saisons là-bas. Maintenant je suis au Racing depuis deux ans.
Vendenheim représente quelle étape de ce parcours, les matchs étaient difficiles avec la quête du maintien ?
La première année nous avions fait une bonne saison, il me semble que nous étions quasiment troisième à la mi-saison. Après, il est vrai que cela a été plus difficile, nous avons joué sur les contre-attaques, en nous basant sur notre solidité défensive.
Désormais à Strasbourg, on sent une progression collective chaque année, l’objectif est d’être dans les 6 pour la prochaine D2 ?
C’est surtout créer un collectif solide en D2, engranger les points et se maintenir le plus rapidement possible.
Vous avez le sentiment que le statut de l’équipe change chaque année, aussi bien au sein de votre groupe que dans la manière dont les adversaires vous craignent ?
Pas forcément, après nous entendons que les équipes nous craignent de plus en plus au vu de nos performances. Maintenant, il faut montrer notre visage conquérant à chaque match et surtout ne jamais se reposer sur ses lauriers. Chaque rencontre est différente. Nous pouvons faire de bonnes parties contre les “grosses” équipes mais ensuite passer à côté d’autres rencontres contre des équipes que nous aurions sous estimées.
« Il faut se montrer conquérante chaque semaine »
Il y a des surprises quand on voit les résultats, c’est ce qui fait tout l’intérêt de ce championnat. Ce sera compliqué chaque semaine. Et les six descentes sont stressantes.
De quelle manière vos amis réagissent en apprenant que vous jouez au Racing ? C’est une institution dans la région…
Il y a une petite fierté, oui, car quand on parle du Racing, c’est immédiatement le haut niveau, le plus grand club en Alsace.
À propos, quelle est votre plus grande fierté ? Le Mondial U20 ?
Tout à fait. Aujourd’hui, je n’en garde que du bonheur, mais tout de même une pointe d’injustice, car nous avons un penalty sifflé par la VAR contre nous à la dernière seconde… Cela a été compliqué au retour de la Coupe du monde, de me remettre de ces émotions. Avoir inscrit le 3-2… j’ai mis du temps à prendre conscience de tout cela. C’est rare que je marque !
Et puis le fait même d’être là-bas, de me retrouver titulaire alors que je ne pensais pas avoir de temps de jeu. Mes parents m’ont suivie jusqu’au Costa Rica. Le reste de ma famille se levait à 4h du matin pour suivre les rencontres.
« J’ai redoublé d’efforts en revenant du Mondial »
À Strasbourg, vous êtes incontournable. Vous attendiez- vous à ce rôle ? Et ressentez-vous une pression avec ce poste clé sur le terrain (sentinelle) ?
En venant au Racing, je savais qu’il y avait de très fortes joueuses. Je m’attendais à une concurrence élevée. Il faut prouver, à chaque entraînement. En rentrant de la Coupe du monde, j’ai tenu à redoubler d’efforts, pour montrer que je n’étais pas partie pour rien là-bas et que j’ai les qualités. Quand on a un statut, on souhaite le confirmer et la confiance du coach m’aide aujourd’hui.
On a le sentiment parfois que tous les ballons passent par vous, ce n’est pas anodin ?
Je suis la seule positionnée en 6, automatiquement, je suis là pour orienter le jeu, plus que certaines filles qui sont devant moi car elles ont plus la responsabilité de finir les actions. Moi je dois être à l’origine de l’action. Cette année, mon rôle est un peu plus défensif. À la récupération de la balle, je dois ensuite jouer simple et orienter le jeu.
Diriez-vous qu’il s’agit de votre première qualité, la vision de jeu ?
Je pense que c’est là, dans mon jeu long, qui me permet des fois d’orienter rapidement le jeu à l’opposé. Après je pense que je peux progresser sur certains choix. Et je dois travailler mon pied faible, mon pied droit. Enfin, dans la prise d’information sans ballon, je peux encore apprendre.
En tout cas, le Racing semble un passage idéal de votre progression. Vous enchaînez les matchs dans une équipe qui obtient des résultats… Tout est positif quelque part ?
Je suis très bien ici, le collectif est bon. Il y a des filles que je connais depuis un moment, ayant été au pôle espoir avec elles. Automatiquement, sur le terrain, nous remarquons les automatismes. Il ne s’agit pas d’une compilation d’individualités mais d’un collectif qui performe.
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Tout marche donc bien pour le moment, vous êtes jeune, votre famille n’est pas loin, mais comment voyez-vous votre avenir, le football sera toujours quelque part ?
Mon projet sera axé sur le football. C’est sûr qu’il ne faut pas tout relâcher à côté car nous ne sommes jamais sûr de percer au haut niveau, mais je me concentre sur le football, avec l’envie de jouer au plus haut niveau possible. Même avant le pôle espoir, quand je jouais encore avec les garçons, je prenais du plaisir dans le football et je me suis dit que je devais en faire mon métier. Ensuite, le pôle m’a permis d’affiner cette envie. J’ai intégré les équipes de France jeunes.
L’évolution du paysage du football féminin, la médiatisation croissante, vous poussent dans cet objectif d’en faire votre vie ?
Nous voyons que beaucoup de joueuses réussissent, en étant passées par là, le pôle espoir, les sélections jeunes… Je rêve du même parcours. Tout cela va passer par le travail.
Propos recueillis par Jérôme Flury
Photos © Nathalie Querouil et Jérôme Flury