La décision de mise en retrait de Renard, Katoto et Diani à quelques mois du Mondial 2023 témoigne de leur courage mais aussi de leur souffrance alors que ces trois joueuses rêvaient tant de prendre part à la plus belle des compétitions avec l’équipe de France féminine.
Le crève-cœur est immense. Pour une joueuse qui l’est tout autant. Si « nul n’est au-dessus de l’institution Équipe de France », comme l’a rapidement rappelé la Fédération après la mise en retrait de Wendie Renard ce 24 février 2023, cette décision, à quelques mois du Mondial en Australie et Nouvelle-Zélande, a peut-être été la plus difficile de la vie de la future ex-capitaine des Bleues.
Parce que l’histoire de Wendie Renard avec les Bleues, et plus précisément avec la Coupe du monde, est longue. Et semée de déceptions. Wendie Renard a fait partie du groupe qui a décroché le meilleur résultat tricolore de l’Histoire. En 2011, elle était là. La défenseure était titulaire dans l’équipe de Bruno Bini qui terminait 4e après la petite finale perdue face à la Suède.
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Après un Euro 2013 terriblement frustrant (élimination aux tirs au but contre le Danemark en quarts), Wendie Renard est du Mondial 2015. Cette fois, c’est Philippe Bergeroo qui la choisit pour aller au Canada. A cette époque, la France avait gagné ses dix matchs de qualification et battait par exemple Allemagne, Brésil, Etats-Unis ou Canada en amicaux de préparation. Capitaine, elle se montre solide derrière, la France encaissant trois buts en cinq matchs, dont deux lors d’une partie ratée contre la Colombie.
« Je tombe des nues »
Mais si la capitaine marque son tir au but contre l’Allemagne, le parcours s’arrête en quarts après un nul 1-1. Wendie Renard n’a pas encore 25 ans et accumule l’expérience et les titres avec l’OL. Les JO 2016 et l’Euro 2017 sont encore des frustrations avec des éliminations en quart sur le plus petit des scores.
Peu après son arrivée au poste de sélectionneure, Corinne Diacre lui retire le brassard de capitaine. La Martiniquaise revient plus tard sur cet épisode. Dans son autobiographie, Mon étoile, elle détaille les difficultés de communication avec sa sélectionneuse. « Je tombe des nues, sonnée. Quatre ans de capitanat balayée en moins de cinq minutes. »
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Mais Wendie Renard est incontournable. Que ce soit pour son leadership ou ses qualités, défensives comme offensives, impossible de s’en passer. La joueuse est au Mondial 2019, le Mondial joué en France. Elle donne tout et termine meilleure buteuse de l’équipe. Elle réduit même le score contre les Etats-Unis en quart. Las, encore ratée, la France sort.
Wendie Renard fêtera son 33e anniversaire le 20 juillet, premier jour du Mondial 2023. Cette Coupe du monde pouvait être sa dernière. Sa volonté de réaliser quelque chose de grand avec sa sélection a toujours été là. Mais elle n’en pouvait plus. « Je ne ferai malheureusement pas cette Coupe du monde dans ces conditions.” Son cri du coeur sera-t-il entendu ? Et à temps ?
Diani et Katoto, une mise en retrait tout aussi douloureuse
Elle n’est en tout cas pas la seule à tirer potentiellement une croix sur cet immense rêve. Kadidiatou Diani, superstar du Paris Saint-Germain, a suivi le même chemin en demandant des « changements profonds nécessaires”. Elle n’avait eu que 6 minutes de jeu au Mondial 2015 avant de briller en France. Quatre fois titulaire, elle avait délivré une passe décisive contre le Brésil en huitièmes. Et dans sa belle carrière, une nouvelle participation au Mondial pouvait encore être enrichissante. Même si l’attaquante n’a que 27 ans, elle n’aura plus beaucoup de possibilités de vivre pareille aventure.
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Enfin, la décision de se mettre en retrait a aussi dû être terriblement compliquée à prendre pour Marie-Antoinette Katoto. La jeune joueuse, qui avait remporté l’Euro U19 en 2016, a déjà vécu deux énormes frustrations avec la sélection. Le Mondial 2019, auquel elle prétendait, mais où elle n’avait pas été sélectionnée. Puis l’Euro 2022, qu’elle a commencé par un but et une passe décisive lors du premier match. Lors du deuxième, elle subissait une rupture des ligaments croisés du genou. Une blessure qui fait partie des raisons qu’elle a évoqué en annonçant son intention de ne plus jouer avec la sélection tant que des changements ne seraient pas adoptés.
Pour ces trois joueuses, qui voient sérieusement s’amoindrir leurs chances de s’envoler en Océanie en juillet prochain, il ne faut pas minimiser la difficulté de cette prise de décision. Leur mal-être était trop profond.
Jérôme Flury
Photo © FFF féminines